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Regards croisés sur la délégation de pouvoirs en droit du travail et droit pénal

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Benoît Cazin Loris Palumbo 5min Evènements

(Petit-déjeuner d’informations organisé le 27 juin dernier par le cabinet d’avocats Spring Legal)

Paris le 11 juillet 2023 – Spring Legal, acteur singulier sur le marché des cabinets d’affaires, a organisé le 27 juin dernier un petit-déjeuner d’informations sur une thématique à la croisée du droit du travail et du droit pénal : les délégations de pouvoirs. Benoît Cazin et Loris Palumbo, avocats associés respectivement en droit du travail et en droit pénal des affaires, étaient à l’initiative de cet événement.

Dans un contexte où les entreprises sont de plus en plus hétérogènes et pour certaines possèdent des sites multiples et éparpillés à travers la France et/ou dans le monde, le/ou les dirigeants sont difficilement en mesure de contrôler seul(s) et de manière effective le respect de la réglementation dans tous les domaines d’interventions de la société qu’il(s) dirige(nt).

Les domaines de compétences extrêmement variés que l’on peut retrouver au sein d’une même entreprise, et ce, même pour les structures de taille moyenne voire pour les plus petites entreprises (compétences financières, comptables, techniques, informatiques, etc.) et la prolifération des normes à respecter portant sur des sujets aussi larges que variés (protection des données, la santé, la sécurité, le respect de la vie privée etc.) nécessitent pour le dirigeant la mise en place d’un système permettant de rapprocher l’organe décisionnel du lieu d’exécution.

Après avoir mis en exergue les principaux enjeux, les deux experts ont présenté la délégation de pouvoirs comme un outil juridique efficace d’organisation et de structuration d’une entreprise.

La délégation de pouvoirs est un acte juridique par lequel un chef d’entreprise (le déléguant) va confier une partie de ses pouvoirs, qu’il détient de mandat social ou de contrat de travail, à un subordonné (le délégataire). Cet acte s’accompagne d’un transfert de responsabilité pénale du déléguant vers le délégataire, et en cas de manquement à une obligation sanctionnable pénalement, le délégataire sera responsable à la place du chef d’entreprise. Si la délégation de pouvoir a un effet exonératoire pour le déléguant, l’employeur reste civilement responsable des condamnations prononcées contre le délégataire, ainsi l’employeur continue en principe d’assumer les conséquences civiles d’infractions commises par un préposé.

Même si le délégataire est susceptible d’engager, en cas de manquements et comme pouvait le faire le dirigeant, la responsabilité pénale de la personne morale, les deux intervenants expliquent qu’en pratique, la mise en place d’un système efficace de délégations de pouvoirs limite l’exposition de la personne morale.

Selon eux, ceci s’explique notamment i) par la formation de salariés spécialisés mieux à même de réaliser l’impact de diverses situations (obligations de sécurité, respect des lois, etc.) et ii) par une exposition médiatique moins importante de la personne morale lorsqu’en cas de manquement, le délégataire et non le dirigeant est directement impliqué.

Les deux associés sont ensuite revenus, à la suite de l’intervention d’un invité, sur la question du dirigeant qui « se défausserait de sa responsabilité sur un salarié » : les experts ont notamment rappelé qu’un dirigeant ne peut déléguer ses pouvoirs relatifs à l’organisation et la politique générale de l’entreprise (prérogatives constituant « le cœur de métier du chef » d’entreprise), tout comme il ne peut déléguer l’intégralité de ses pouvoirs.

Loris Palumbo a ensuite donné des conseils pratiques afin de limiter l’exposition de la personne morale :

  • Choisir un délégataire bien formé, plus il le sera, moindre sera le risque de manquement à la réglementation et donc d’exposition de la personne morale ;
  • A la suite d’un manquement et en cas d’enquête, communiquer au plus vite aux enquêteurs et/ou au magistrat en charge de la procédure les éventuelles délégations de pouvoirs et un organigramme précis de l’entreprise visée. Selon Loris Palumbo, il est, en effet, indispensable que les enquêteurs identifient au plus vite le mode de fonctionnement et la répartition des rôles au sein de l’entreprise.

Par la suite, Benoit Cazin est revenu sur les conditions de validité d’une délégation de pouvoirs. Selon lui, le délégataire doit disposer :

  • D’un niveau hiérarchique, d’une qualification requise comprenant aussi bien des compétences techniques que juridiques,
  • Des moyens techniques, humains, financiers, nécessaires pour assurer le respect de la réglementation dans le domaine d’intervention ;
  • D’autonomie dans la prise de décision dans son domaine d’intervention (sans en référer au chef d’entreprise, il n’est pas un simple exécutant malgré le lien de subordination du contrat de travail du délégataire).

Benoit Cazin a rappelé qu’il fallait être particulièrement vigilant dans la rédaction des délégations de pouvoirs puisqu’en pratique et le plus souvent les magistrats sont très attentifs au respect des conditions de validité.

Pour aller plus loin, les intervenants ont partagé des conseils et bonnes pratiques en la matière : les éléments indispensables pour mettre en place un système efficient de
délégations de pouvoirs et ainsi éviter l’inopposabilité de celles-ci, ce qui doit clairement apparaître dans les délégations, des conseils concernant les subdélégations et le suivi des délégations, etc.

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